Homélie du 9 mars 2025
Le Christ est conduit au désert pendant 40 jours pour y être tenté. Notre carême étant vécu en communion avec ces 40 jours de Jésus, il est une période intensive de tentations, un moment de grâce pour se rappeler que le combat spirituel fait partie de la vie chrétienne. C’est après son baptême que Jésus est tenté, c’est-à-dire après sa proclamation publique qui le révèle Fils bien aimé de Dieu. Pour nous il en est de même. Tant que nous restons animés par l’esprit du monde, le diable n’a pas besoin de nous tenter, il nous manipule facilement, faisant passer un bien pour un mal et un mal pour un bien. Le jour où on fait le choix de Dieu, alors la manipulation du diable n’a plus de prise sur nous et il lui reste la séduction de la tentation. C’est pourquoi le temps de carême qui invite à nous déterminer pour le Christ, est un entraînement intensif de tentations. Parlons un peu de la tentation, puis des trois principales tentations et enfin de comment y résister.
1-La tentation vient du diable et elle n’est pas un péché
Padre Pio disait : « Le diable est comme un chien enragé attaché à une chaîne ; au-delà de la chaîne, il ne peut happer personne. Tiens-toi loin de lui. Si tu approches trop, tu te feras prendre. Souviens-toi que le diable a une seule porte pour entrer dans notre intérieur : notre volonté ».
Cette image du saint Padre Pio permet de distinguer la tentation et le péché. La tentation est de l’ordre du sentir (écouter, voir) et le péché de l’ordre du consentir volontaire. Le péché commence dès l’instant où l’on prête l’oreille à la tentation, où on la laisse s’introduire en nous. Sentir est une tentation, consentir est un péché. Avoir des pensées mauvaises est une tentation, y consentir en pensée, en parole ou en acte est un péché. Or Jésus ne consent absolument pas à la tentation. Aux assauts du tentateur dans le désert, il oppose le rempart de la Parole de Dieu. Lire un psaume comme le 91 ou le 23, prier avec Marie quand vient la tentation est une expérience à faire.
Distinguons tout d’abord l’épreuve que Dieu permet et la tentation du diable. Dieu peut nous mettre à l’épreuve, mais ce sera toujours pour nous faire grandir et pour notre salut. La tentation vient toujours du diable qui attaque sur les points faibles pour faire tomber et éloigner de Dieu. Jésus a été tenté par le diable. « Dans le Christ c’est nous qui sommes tentés » dit St Augustin. Dans la mesure où le chrétien vit en Christ, il peut compter sur Lui pour vaincre dans la tentation.
2-Les trois tentations de l’avoir, du pouvoir et du savoir
Les trois tentations de Jésus comprennent selon saint Luc « toutes les formes de tentations ». Elles correspondent aux trois tentations d’Israël dans le désert, pendant l’Exode, elles résument toutes nos tentations dont les racines sont au nombre de trois : l’avoir, le pouvoir et le savoir.
La tentation de l’avoir : changer les pierres en pain pour résoudre la faim dans le désert. Certes la faim est un besoin fondamental, mais ce besoin ne peut-être couvert à tout prix, sans le respect de la création. La pierre à sa vocation, sa place propre dans la création, elle doit être respectée en tant que telle. Les minerais ont-ils pour vocation de finir leur vie dans nos smartphones ou dans d’autres technologies au service de l’humanité ? Comme arme contre cette tentation de posséder les choses ou les autres, Jésus nous donne le conseil évangélique de la chasteté qui consiste à respecter les choses et le prochain dans sa vocation, dans son âme et dans son corps : sa femme, son mari, son frère, son ami, son fils.
La tentation du pouvoir : recevoir la gloire de tous les royaumes de la terre à condition de se prosterner devant le diable : c’est la tentation de l’idolâtrie et du pouvoir. Quand mon travail, ma passion, tel talent, ma notoriété deviennent une fin en soi, ils sont comme une idole pour laquelle je sacrifie ma vie. Le remède pour cette tentation est le conseil évangélique de l’obéissance et la prière d’adoration. Quand je reçois mon service d’un autre pour un temps donné, alors je suis protégé du risque de me l’approprier. Quand je me prosterne en adoration devant Jésus dans la chapelle St Joseph, alors je reconnais humblement que toute la puissance vient de Lui.
Enfin, la tentation de tout savoir : se jeter du plus haut point du Temple pour vérifier qu’il est bien le Fils de Dieu et que son Père enverra ses anges pour le protéger de la chute. C’est la tentation de mettre Dieu à l’épreuve en disant : « Dieu est-il avec nous, oui ou non ? » C’est la tentation contre la foi lorsque l’on traverse une épreuve et que Dieu semble se taire. C’est la tentation de tout savoir du projet de Dieu au lieu de Lui faire confiance. Le remède contre la tentation de tout savoir est le conseil évangélique de la pauvreté. Le pauvre de cœur est celui qui accepte de dépendre de Dieu le Père et de vivre en fils bien aimé.
3-Comment lutter contre la tentation dans nos vies ?
Voici un exemple de combat spirituel : une personne me disait : « Sauter un repas pour le travail, ou pour des motifs humains comme un régime ne me pose aucune difficulté. Mais dès que je décide de jeûner par amour pour Dieu, au pain ou au riz pendant un ou deux repas par jour, alors la faim apparaît dès 11h, je suis de mauvaise humeur, j’ai un coup de fatigue ». Cela fait partie du combat spirituel qui vient quand on fait quelque chose pour Dieu, même si ce n’est pas très compliqué.
Voici trois repères pour lutter efficacement avec Jésus contre le tentateur :
-La foi en Jésus : elle consiste à mettre toute sa confiance en Dieu et de vivre animé par son Esprit et non par celui du monde.
-La Parole de Dieu à écouter dans la prière, méditer et mettre en pratique au quotidien
-L’unité avec les frères et l’Église : le diable est celui qui divise et Dieu celui qui unifie.
Pendant l’entraînement spirituel du carême, le Tentateur va intensifier son combat contre nous, en cherchant à nous éloigner du vrai Dieu. Demandons au Seigneur la grâce du discernement afin de démasquer le Menteur, de repérer ses ruses, de repousser ses manœuvres. À celui qui trouve son refuge en Lui, Dieu dit : « Il m’appelle, et moi, je lui réponds ; je suis avec lui dans son épreuve. » Dieu a choisi de vivre les tentations humaines en Jésus pour les habiter de sa puissance divine et être notre refuge. Souvenons-nous que dans nos tentations, c’est le Christ qui est tenté et si nous lui laissons la première place, il sera vainqueur.
Alors, au cours de cet entraînement spirituel du carême, apprenons à mettre le Christ au cœur de nos vies en faisant nôtre ses paroles au Père : « ne nous laisse pas entrer en tentation », ne laisse pas la tentation avoir prise sur nous, ne la laisse pas nous envahir, nous convaincre, mais « délivre-nous du mal ».